Sentaro, un homme dans sa quarantaine, est le patron d’une petite échoppe de dorayaki, une pâtisserie japonaise populaire qui consiste en une noix de pâte de haricot rouge glissée entre deux petits pancakes bien moelleux. Sentaro travaille seul, et il aurait bien besoin d’un commis. Il placarde une annonce pour un petit boulot sur la devanture de sa boutique. Un jour, une vieille femme se présente à sa porte. Ce petit boulot, elle le veut, mais il lui répond que le travail est trop dur. Il va rapidement changer d’avis quand, le soir, elle revient avec une petite boite de pâte de haricots rouges qu’elle a cuisinée elle-même.
Alors bien sûr, le film met à l’honneur la cuisine japonaise, et nous régale de plans plus délicieux les uns que les autres. On voit la cuisson des dorayakis, la dégustation de tempura dans un restaurant et surtout, surtout la superbe scène de la confection de la pâte de haricots rouges. L’angle de vue est minutieusement choisi, jamais de plans larges mais un focus sur les détails, les haricots, le sirop. On aborde ici la cuisine avec une délicatesse toute particulière, aussi bien dans le visuel que dans le jeu des acteurs ou les dialogues, qui prennent le temps d’explorer toute la symbolique et l’amour que l’on peut trouver dans la préparation de petits gâteaux. Dans la même lignée, « Les délices de Tokyo », fait la part belle à la nature avec de nombreux plans dédiés à la contemplation des arbres, des fleurs, ou des feuilles qui volent au vent.
Mais cuisine et nature ne sont pas les seuls moteurs du film, bien au contraire. Ces thématiques servent la découverte des trois personnages principaux, dont les histoires personnelles sont révélées au fur et à mesure. Le récit est touchant, et mêle trois générations d’individus qui se lient autour d’une problématique sociale contemporaine : la solitude. Pour une raison ou pour une autre, ces personnes se trouvent rejetées par la société, incomprises, et vont trouver en chacune des deux autres une forme de soutien, par-delà la différence d’âge. Une jolie manière, en somme, de parler des relations intergénérationnelles, mais aussi du poids et de la souffrance que peut engendrer la demande de conformité aux normes de la société, deux thématiques particulièrement importantes au pays du Soleil Levant. Finalement, et vous l’aurez compris, « Les délices de Tokyo » est un film qui parle de cuisine, mais pas que. Amateurs de rythme lent et d’esthétique raffinée, ce long métrage est fait pour vous. Pour ceux qui ne chérissent que les films rapides et l’action, passez votre chemin. Dans l’ensemble, le pari est réussi et l’émotion au rendez-vous.